la mortalité des femmes risque-t-elle vraiment d’exploser?

la mortalité des femmes risque-t-elle vraiment d’exploser?

Des chiffres effrayants. En 2030, le nombre de femmes dans le monde qui décèderaient suite à un cancer pourrait atteindre 3,5 millions, soit une hausse de 60 % par rapport à 2012. Mais ces prédictions, issues d’un rapport présenté par la Société américaine du cancer (ACS) lors du congrès mondial du cancer réuni à Paris jusqu’à jeudi, concernent le monde entier et soulignent les disparités entre pays défavorisés et développés. De quoi s'inquiéter en France ?


«Ces chiffres ne sont pas transposables en France, rassure Roman Rouzier, spécialiste des cancers gynécologiques à l'Institu Curie. Ces dernières années, les incidences et la mortalité diminuent sur nombre de cancers. »


Une différence homme/femme Selon la dernière synthèse de l’Institut du Cancer, le nombre de décès après un cancer a baissé de -2,9 % par an entre 2005 et 2012 pour les hommes et de seulement 1, 4 % par an pour les femmes. En observant ce schéma, il est clair que la mortalité liée à un cancer a beaucoup régressé pour les hommes… moins pour les femmes.


Ce qui n’est pas le signe d’un sexisme dans la recherche. « Beaucoup de cancers ORL, œsophage, larynx, estomac ont diminué ou même disparu et ils concernaient davantage les hommes », analyse Roman Rouzier. « En réalité, c’est plutôt que le nombre de cancers des femmes rattrape le niveau des hommes… ce qui n’est pas très glorieux. » En effet, les hommes fument et boivent moins qu’avant… et les femmes s’y sont mises.


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En France, une augmentation probable Deux facteurs non liés aux cancers doivent pris en compte quand on parle d'avenir. Tout d’abord l’augmentation de la population. Mais aussi les autres pathologies. « Il y a une compétition des causes de décès: si le nombre d’AVC, d’infarctus baissent, il y a un effet de loupe sur les cancers qui tuent davantage », reprend le médecin. Si pour la France, on ne peut parler d’explosion, « il n’empêche que le nombre de cas de cancers féminins va augmenter, tranche Jacqueline Goudet, présidente de la Ligue contre le cancer. Mais pas au même rythme et pas les mêmes cancers que dans les pays émergents. On ne peut avancer de chiffre pour la France, mais il est probable que les cancers du sein et du poumon touchent davantage de femmes. » Ce qui s’explique par plusieurs facteurs.


Pourquoi le cancer du sein ? « Le cancer du sein globalement tue moins, mais on constate une hausse des cas chez les femmes jeunes (moins de 50 ans) et de plus de 75 ans », poursuit Roman Rouzier. Un constat inexpliqué pour le moment. Une des causes pourrait être liée à la maternité tardive. « Autant une grossesse pour une femme jeune protège du cancer, autant après 30 ans c’est l’inverse, souligne le médecin. La stimulation hormonale peut favoriser le cancer du sein. » Or, . selon l’Insee, l’âge moyen des mères à l’accouchement quel que soit le rang de naissance de l’enfant atteint 30 ans en 2010. Autre explication : les femmes boivent presque autant que les hommes aujourd’hui. « Il y a un effet « œstrogène like » de l’alcool, qui agit comme une stimulation hormonale, explique le médecin. Des études ont prouvé que mettre un peu d’éthanol sur des cellules vont les faire croître. » Boire sans compter accroît donc le risque de développer un cancer du sein.


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Pourquoi le cancer du poumon ? « Le cancer du poumon va passer devant tous les autres cancers pour les femmes dans les prochaines années », prédit Roman Rouzier. Or le taux de survie est qualifié de « catastrophique » par le professeur. En effet, selon les chiffres de Tabac Info service, l’écart entre hommes et femmes s’est resserré. Dans la population masculine, la proportion de fumeurs réguliers est passé de 57 % en 1960 à 32 % aujourd’hui. En revanche, la proportion de fumeuses est passé de 10 à 26 %. Mais depuis 2010, le nombre de fumeurs et fumeuses tend à se stabiliser.


Et pour le cancer du col de l’utérus ? Même si ce cancer n’est que le 12e en France pour les femmes, ni son incidence ni sa mortalité ne baissent. « En France, on n’arrive pas augmenter le dépistage du cancer du col de l’utérus depuis vingt ans et la vaccination a mauvaise presse », résume Roman Rouzier. « En France, il y a des îlots de populations vulnérables, défavorisées, souvent d’origine étrangère, qui ont peu accès au dépistage », renchérit Jacqueline Godet.


Le mode de vie Quel que soit le cancer, les spécialistes alertent sur l’environnement et les mauvaises habitudes qui accroissent les risques. Pollution de l’air, pesticides dans l’alimentation, manque de sport et obésité sont dans le viseur des chercheurs. « Il ne faut surtout pas suivre l’exemple américain, où l’obésité fait des ravages », tranche Roman Rouzier. Si la France en est encore loin, une étude publiée la semaine dernière a tiré la sonnette d’alarme. En effet, selon Santé publique France, près de la moitié des Français de plus de 30 ans est concernée par le surpoids et 16 % par l’obésitéEt le médecin de conclure: « On doit mettre le paquet sur la prévention primaire, en expliquant très tôt l’importance du sport, d’une alimentation saine, des dangers du tabac et de l’alcool.»

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